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Soudain, elle s’arrête…

La face du baron de Gortz la terrifie… Une épouvante inexplicable la paralyse… Elle porte vivement la main à sa bouche, qui se rougit de sang… Elle chancelle… elle tombe…

Le public s’est levé, palpitant, affolé, au comble de l’angoisse…

Un cri s’échappe de la loge du baron de Gortz…

Franz vient de se précipiter sur la scène, il prend la Stilla entre ses bras, il la relève… il la regarde… il l’appelle…

« Morte ! morte !… s’écrie-t-il, morte !… »

La Stilla est morte… Un vaisseau s’est rompu dans sa poitrine… Son chant s’est éteint avec son dernier soupir !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le jeune comte fut rapporté à son hôtel, dans un tel état que l’on craignit pour sa raison. Il ne put assister aux funérailles de la Stilla, qui furent célébrées au milieu d’un immense concours de la population napolitaine.

Au cimetière du Campo Santo Nuovo, où la cantatrice fut inhumée, on ne lit que ce nom sur un marbre blanc :

STILLA.

Le soir des funérailles, un homme vint au Campo Santo Nuovo. Là, les yeux hagards, la tête inclinée, les lèvres serrées comme si elles eussent été déjà scellées par la mort, il regarda longtemps la place où la Stilla était ensevelie. Il semblait prêter l’oreille, comme si la voix de la grande artiste allait une dernière fois s’échapper de cette tombe…

C’était Rodolphe de Gortz.

La nuit même, le baron de Gortz, accompagné de Orfanik, quitta Naples, et, depuis son départ, personne n’aurait pu dire ce qu’il était devenu.

Mais, le lendemain, une lettre arrivait à l’adresse du jeune comte.