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DÉNOUEMENT.

d’eux permirent de constater qu’ils avaient essayé de se nourrir de poissons et de crustacés ; mais nulle part ni trace de foyer, ni charbons éteints, ni cendre. Ils n’avaient plus évidemment aucun moyen de se procurer du feu.

Enfin, dans la soirée du lendemain, un peu avant le coucher du soleil, un homme apparut au milieu des rochers bordant la crique, à moins de cinq cents mètres du phare.

C’était presque à la place d’où John Davis et Vasquez, redoutant le départ de la goélette, l’avaient observée la veille de l’arrivée de l’aviso, dans cette soirée au cours de laquelle ce dernier s’était résolu à tenter un suprême effort.

Cet homme c’était Kongre.

Vasquez qui se promenait dans l’enceinte avec les nouveaux gardiens, le reconnut aussitôt, et s’écria :

« Le voilà !… le voilà !… »

À ce cri, le commandant Lafayate, qui arpentait la grève avec le second, se hâta d’accourir.

John Davis et quelques matelots s’étaient élancés à sa suite, et tous, réunis sur le terre-plein, purent voir ce chef survivant seul de la bande qu’il commandait.

Que venait-il faire en cet endroit ? Pourquoi se montrait-il ? Son intention était-elle de se rendre ? Il ne devait cependant point se méprendre sur le sort qui l’attendait. Il serait emmené à Buenos-Ayres et paierait de sa tête toute une existence de vols et de meurtres.

Kongre demeurait immobile sur un rocher plus élevé que les autres et contre lequel la mer venait doucement se briser. Ses regards parcouraient la crique. Près de l’aviso, il pouvait apercevoir cette goélette que la chance lui avait si opportunément envoyée au cap Saint-Barthélemy, et qu’une chance contraire lui avait reprise. Que de pensées devaient se presser dans son cerveau ! Que de regrets ! Sans l’arrivée de l’aviso, il eût été depuis longtemps dans les mers du Pacifique, où il lui eût été si