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LE PHARE DU BOUT DU MONDE.

exposée si le vent fraîchissait du large. Il convenait avant tout de la déhaler du banc dès qu’elle flotterait. Or, le flot ne tarderait pas à se faire sentir, et, dans quelques heures, il y aurait pleine mer.

Kongre dit à Carcante :

« Nous allons tout préparer pour touer la goélette dès qu’elle aura suffisamment d’eau sous sa quille… Il est possible qu’elle n’ait point d’avaries graves et n’emplisse pas…

— C’est ce que nous saurons bientôt, répondit Carcante, car la marée commence à monter ; et alors, que ferons-nous, Kongre ?

— Nous déhalerons la Maule en dehors des récifs, et nous la conduirons le long du cap au fond de la crique des Pingouins, devant les cavernes. Là elle ne touchera pas, même au plus bas du jusant, puisqu’elle ne cale que six pieds.

— Et puis ? demanda Carcante.

— Et puis, nous embarquerons tout ce que nous avons apporté de la baie d’Elgor…

— Et ensuite ?… fit Carcante.

— Nous aviserons », répondit simplement Kongre.

On se mit au travail, de manière à ne point perdre la prochaine marée, ce qui eût retardé de douze heures le renflouage de la goélette. Il fallait, à tout prix, qu’elle fût mouillée dans la crique avant midi. Là elle serait toujours à flot, et relativement en sûreté si le temps se maintenait.

Tout d’abord, Kongre, aidé de ses hommes, fit enlever l’ancre du bossoir de tribord, et on la fixa en dehors du banc en allongeant la chaîne sur toute sa longueur. De cette façon, dès que la quille ne porterait plus sur le sable, il serait possible de touer la goélette jusqu’à l’endroit où elle se retrouverait en eau profonde. Avant que la marée ne commençât à perdre, on aurait le temps d’atteindre la crique, et pendant l’après-midi, d’effectuer une complète visite de la cale.