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l’invasion de la mer

cours qu’il prononça ne pouvaient être entendus du capitaine ni du brigadier. De nouveaux cris furent poussés, lorsque la réunion s’acheva, et, Hadjar ayant regagné son habitation, la bourgade retrouva sa tranquillité habituelle.

Le capitaine Hardigan et Pistache redescendirent aussitôt dans la cour, et firent part à leurs compagnons de ce qu’ils avaient observé.

« Je pense, dit l’ingénieur, que cette réunion aura été faite pour protester contre l’inondation des chotts, et qu’elle sera suivie de quelque nouvelle agression, sans doute…

— Je le crois aussi, déclara le capitaine Hardigan. Cela pourrait indiquer que Pointar s’est réinstallé à la section du Goléah.

— À moins qu’il ne s’agisse de nous, dit le brigadier Pistache, et que tous ces coquins n’aient été réunis que pour assister au massacre des prisonniers !… »

Un long silence suivit cette observation. Le capitaine et l’ingénieur avaient échangé un regard qui trahissait leurs secrètes pensées. Que le chef targui fût résolu à exercer des représailles, qu’il voulût donner l’exemple d’une exécution publique, que diverses tribus de l’Hinguiz eussent été convoquées à Zenfig dans ce but, n’y avait-il pas lieu de le craindre ?… Et, d’autre part, comment conserver l’espoir qu’un secours quelconque pût arriver, soit de Biskra, soit de Goléah, puisque le lieutenant Villette devait ignorer à quel endroit les prisonniers avaient été conduits, et aussi entre les mains de quelle tribu ils étaient tombés ?…

Or, avant de descendre du minaret, le capitaine Hardigan et le brigadier avaient une dernière fois parcouru du regard toute la partie du Melrir qui s’étendait devant eux. Désert au nord comme au sud, déserte également la portion qui se prolongeait à l’est et à l’ouest des deux côtés de l’Hinguiz, qui deviendrait île après l’inondation du chott. Aucune caravane ne se montrait, à travers la vaste dépression. Quant au détachement du lieu-