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l’oasis de zenfig.

Du reste, si le Targui est plutôt sobre, s’il ne se nourrit ni de poissons ni de gibier, s’il ne consomme que peu de viande, si les dattes, les figues, les baies de la « Salvadora persica », la farine, le laitage, les œufs lui suffisent, il n’en a pas moins des esclaves à son service, des « imrhad », chargés des grosses besognes, car il n’a que dédain pour toute espèce de travail. Quant aux « ifguna », aux marabouts, aux vendeurs d’amulettes, leur influence est très sérieuse sur la race touareg, plus particulièrement en cette région du Melrir. C’étaient ces fanatiques qui prêchaient la révolte contre ce projet d’une mer saharienne. Le Targui est d’ailleurs superstitieux, il croit aux esprits, il redoute les revenants, à ce point qu’il ne pleure pas ses morts par crainte de les ressusciter, et, dans les familles, le nom du défunt s’éteint avec lui.

Telle était, en quelques traits, cette tribu de Zenfig à laquelle appartenait Hadjar. Elle l’avait toujours reconnu pour son chef jusqu’au jour où il tomba entre les mains du capitaine Hardigan.

Là aussi était le berceau de sa famille, toute-puissante sur cette population spéciale de Zenfig, comme aussi sur les autres tribus du Melrir. Nombre d’oasis existaient à la surface du chott, sur divers points de l’Hinguiz et du vaste périmètre de la dépression.

À côté de Hadjar, sa mère Djemma était en grande vénération parmi les tribus touareg. Chez les femmes de Zenfig, ce sentiment allait même jusqu’à l’adoration. Toutes partageaient cette haine que Djemma ressentait pour les étrangers. Elle les fanatisait comme son fils fanatisait les hommes, et l’on n’a pas oublié quelle influence Djemma avait sur Hadjar, — influence que possèdent toutes les femmes touareg. Elles sont, d’ailleurs, plus instruites que leurs maris et leurs frères. Elles savent écrire alors que le Targui sait lire à peine, et, dans les écoles, ce sont elles qui enseignent la langue et la grammaire. En ce qui con-