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le second canal.

— Non… je ne le crois pas, brigadier ; sans doute, il n’y aurait pas assez d’eau pour elles…

— Oh ! monsieur François, d’après ce que nous disait notre marchef, vingt mètres de profondeur au Rharsa et vingt-cinq au Melrir !…

— Pas partout, brigadier, et il faut de l’eau à ces géants du monde sous-marin pour qu’ils puissent prendre leurs ébats et souffler à leur aise !…

— Ça souffle fort, monsieur François ?…

— À remplir les souffleries d’un haut fourneau ou les orgues de toutes les cathédrales de France ! »

Et si M. François fut satisfait de sa réponse si péremptoire, qui ne laissa pas d’étonner un peu ce brave Pistache, on l’admettra sans peine.

Puis il reprit, décrivant avec la main… le périmètre de la nouvelle mer :

« Et je vois déjà cette mer intérieure sillonnée de steamers ou de voiliers se livrant au grand et au petit cabotage, allant de port en port, et savez-vous quel serait mon plus vif désir, brigadier ?…

— Exprimez-le, monsieur François…

— Ce serait d’être à bord du premier bâtiment qui cinglera à travers les eaux nouvelles de ces anciens chotts algériens… Et je compte un peu que M. l’ingénieur aura pris passage sur ce navire, et que je ferai avec lui le tour de cette mer, créée de nos propres mains. »

En vérité, le digne M. François n’était pas éloigné de croire qu’il était quelque peu le collaborateur de son maître, dans cette création future de la mer Saharienne.

En somme, — et c’est sur ce vœu que le brigadier Pistache acheva cette intéressante conversation, — puisque l’expédition avait si bien commencé, il était permis d’espérer qu’elle finirait de même.