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l’invasion de la mer

et à travers la sebkha, ne vienne à disparaître subitement. Nicol ne parvient pas à le retenir…

— Si pareil malheur arrivait à son chien, déclara le lieutenant Villette, quel chagrin il en éprouverait !…

— Et Va-d’l’avant, ajouta le capitaine, je suis sûr qu’il en mourrait de douleur !

— C’est du reste une bien singulière amitié qui existe entre ces deux braves animaux, observa l’ingénieur.

— Très singulière, dit le lieutenant Villette. Au moins, Oreste et Pylade, Nisus et Euryale, Damon et Pithias, Achille et Patrocle, Alexandre et Ephestion, Hercule et Pirithoüs étaient-ils de même race, tandis qu’un cheval et un chien…

— Et un homme, pouvez-vous ajouter, lieutenant, conclut le capitaine Hardigan, car Nicol, Va-d’l’avant et Coupe-à-cœur forment un groupe d’amis inséparables, dans lequel l’homme entre pour un tiers et les bêtes pour deux ! »

Ce qu’avait dit l’ingénieur relativement aux dangers du sol mouvant des chotts n’était point exagéré. Et cependant les caravanes passaient de préférence par la contrée du Melrir, du Rharsa et du Fedjedj. Cette route abrégeait leur parcours, et les voyageurs y trouvaient un chemin plus facile en terrain plat. Mais elles ne le faisaient pas sans l’assistance de guides qui connaissaient parfaitement ces parties lacustres du Djerid et savaient éviter les dangereuses fondrières.

Depuis son départ de Gabès, le détachement n’avait pas encore rencontré une de ces kafila qui transportent les marchandises, les produits du sol, ou produits manufacturés depuis Biskra jusqu’au littoral de la Petite-Syrte, et dont le passage est toujours impatiemment attendu à Nefta, à Gafsa, à Tozeur, à La Hammâ, dans toutes ces villes et bourgades de la basse Tunisie. Mais, pendant la journée du 9 avril, l’après-midi, il prit contact avec une caravane, voici en quelles circonstances.

Il était environ trois heures. Après sa première étape de la