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campagne dans l’archipel.

flammes, brûla jusqu’au moment où l’incendie eut gagné sa ligne de flottaison. Alors il s’abîma dans les flots.

La Syphanta avait fait là bonne et utile besogne. Ce qu’était le chef de cette flottille, son nom, son origine, ses antécédents, on ne devait jamais le savoir, car il refusa obstinément de répondre aux questions qui lui furent faites à ce sujet. Quant à ses compagnons, ils se turent également, et peut-être même, ainsi que cela arrivait quelquefois, ne savaient-ils rien de la vie passée de celui qui les commandait. Mais qu’ils fussent pirates, il n’y avait pas à s’y tromper, et il en fut fait prompte justice.

Cependant, cette apparition et cette disparition de la sacolève avaient singulièrement donné à réfléchir à Henry d’Albaret. En effet, les circonstances dans lesquelles elle venait de quitter Thasos, ne pouvaient que la rendre absolument suspecte. Avait-elle voulu profiter du combat, livré par la corvette à la flottille, pour s’échapper plus sûrement ? Redoutait-elle donc de se trouver en face de la Syphanta qu’elle avait peut-être reconnue ? Un honnête bâtiment fût resté tranquillement dans le port, puisque les pirates ne cherchaient plus qu’à s’en éloigner ! Au contraire, voilà que cette Karysta, au risque de tomber entre leurs mains, s’était hâtée d’appareiller