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pendant dix-sept jours, avait suivi, à peu de chose près, la direction du sud-ouest. Or, avec une vitesse de cent cinquante à cent quatre-vingts milles par vingt-quatre heures, il devait avoir parcouru près de cinquante degrés. D’autre part, il était établi qu’il n’avait pas dépassé la ligne équatoriale. Donc, il fallait chercher la situation de l’île ou du groupe duquel elle dépendait peut-être, dans la partie comprise entre les cent soixantième et cent soixante-dixième degrés nord.

Sur cette portion de l’océan Pacifique, il sembla bien à Godfrey qu’une carte ne lui eût pas offert d’autre archipel que celui des Sandwich ; mais, en dehors de cet archipel, n’y avait-il pas des îles isolées, dont les noms lui échappaient et qui formaient comme un grand semis jusqu’au littoral du Céleste Empire ?

Peu importait, d’ailleurs. Il n’existait aucun moyen d’aller chercher en un autre point de l’Océan une terre plus hospitalière.

« Eh bien, se dit Godfrey, puisque je ne connais pas le nom de cette île, qu’elle soit nommée île Phina, en souvenir de celle que je n’aurais pas dû abandonner pour aller courir le monde, et puisse ce nom nous porter bonheur ! »

Godfrey s’occupa alors de reconnaître si l’île était habitée dans la partie qu’il n’avait pu visiter encore.

Du sommet du cône, il ne vit rien qui décelât des traces d’indigènes, ni habitations dans la prairie, ni maisons à la lisière des arbres, ni même une seule case de pêcheur sur la côte.

Mais si l’île était déserte, cette mer qui l’entourait ne l’était pas moins, et aucun navire ne se montrait dans les limites d’une périphérie à laquelle la hauteur du cône donnait un développement considérable.

Godfrey, exploration faite, n’avait plus qu’à redescendre au pied de la colline et à reprendre le chemin de la forêt, afin d’y rejoindre Tartelett. Mais, avant de quitter la place, son regard fut attiré par une sorte de futaie d’arbres de grande taille, qui se dressait à la limite des prairies du nord. C’était un groupe gigantesque : il dépassait de la tête tous ceux que Godfrey avait vus jusqu’alors.

« Peut-être, se dit-il, y aura-t-il lieu de chercher à s’installer de ce côté, d’autant mieux que, si je ne me trompe, j’aperçois un ruisseau, qui doit prendre naissance à quelque source de la chaîne centrale et coule à travers la prairie »