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l’école des robinsons

une âcre fumée, s’épanchant par l’orifice supérieur, se perdit dans les hautes branches.

« Qu’est-ce donc encore ? » s’écria Godfrey.

Ce n’était que trop explicable. Les fauves, en ravageant tout à l’intérieur de Will-Tree, avaient dispersé les charbons du foyer. Le feu s’était aussitôt communiqué aux objets que renfermait la chambre. La flamme avait atteint l’écorce que sa sécheresse rendait très combustible. Le gigantesque sequoia brûlait par sa base.

La situation devenait donc encore plus terrible qu’elle ne l’avait été jusque-là.

En ce moment, à la lueur de l’incendie, qui éclairait violemment les dessous du groupe des arbres, on pouvait apercevoir les fauves bondir au pied de Will-Tree.

Presque au même instant, une effroyable explosion se produisit. Le séquoia, effroyablement secoué, trembla depuis ses racines jusqu’aux extrêmes branches de sa cime.

C’était la réserve de poudre qui venait de sauter à l’intérieur de Will-Tree, et l’air, violemment chassé, fit irruption par l’orifice, comme les gaz expulsés d’une bouche à feu.

Godfrey et Carèfinotu faillirent être arrachés de leur poste. Très certainement, si Tartelett n’eût pas été attaché solidement, il aurait été précipité sur le sol.

Les fauves, épouvantés par l’explosion, plus ou moins blessés, venaient de prendre la fuite.

Mais, en même temps, l’incendie, alimenté par cette subite combustion de la poudre, prit une extension plus considérable. Il s’avivait en montant au dedans de l’énorme tronc comme dans une cheminée d’appel. De ces larges flammes, qui léchaient les parois intérieures, les plus hautes se propagèrent bientôt jusqu’à la fourche, au milieu des crépitements du bois mort, semblables à des coups de revolver. Une immense lueur éclairait, non seulement le groupe des arbres géants, mais aussi tout le littoral depuis Flag-Point jusqu’au cap sud de Dream-Bay.

Bientôt l’incendie eut gagné les premières branches du séquoia, menaçant d’atteindre l’endroit où s’étaient réfugiés Godfrey et ses deux compagnons. Allaient-ils donc être dévorés par ce feu qu’ils ne pouvaient combattre, ou n’auraient-ils plus que la ressource de se précipiter du haut de cet arbre pour échapper aux flammes ?