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L’AGENCE THOMPSON AND Co.

C’était Robert qui avait prononcé cette phrase, qu’il adressait directement au capitaine. Les yeux de celui-ci brillèrent et se relevèrent interrogateurs.

— L’un de nous, continua Robert, ne peut-il pas partir en éclaireur ? Si nous sommes à trois cent quarante kilomètres de Saint-Louis, avant Saint-Louis il y a Portendick, et entre le Sénégal et ce comptoir s’étendent des bois de gommiers dans lesquels les troupes françaises font de fréquentes patrouilles. Jusque-là il y a tout au plus cent vingt kilomètres que, sous l’empire de la nécessité, un homme isolé peut franchir en deux jours. C’est donc seulement deux jours de vivres à emporter. Pendant ce temps, rien ne s’oppose à ce que le gros des passagers commence à suivre lentement le littoral. Avec un peu de chance, votre émissaire, en quatre jours, ramènera une escorte sous la protection de laquelle on n’aura plus rien à craindre. Si l’on veut, je m’offre à partir à l’instant même.

— Par la barbe de ma mère ! voilà qui est parlé en gentleman ! s’écria le capitaine Pip, en serrant chaleureusement la main de Robert. À cela je n’ai qu’une objection à faire : c’est que ce voyage-là me regarde et qu’il m’appartient de droit.

— C’est une erreur, commandant, objecta Robert.

— Et pourquoi donc ? demanda le capitaine, en fronçant les sourcils.

— D’abord, répondit tranquillement Robert, il y a la question de l’âge. Où je résisterai, vous succomberez.

Le capitaine approuva de la tête.

— En outre, votre place est parmi ceux dont vous êtes le guide et le soutien naturel. Un général ne court pas aux avant-postes.

— Non, dit le capitaine, en serrant de nouveau la main de Robert, mais il y envoie ses soldats d’élite. Vous partirez donc.

— Dans une heure je serai en route, » déclara Robert, qui commença aussitôt ses préparatifs.

La protestation du capitaine demeura isolée. Nul, parmi tous