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KÉRABAN-LE-TÊTU.

police, dont le sourire narquois était bien fait pour l’exaspérer :

« Je pars, dit-il, et, en dépit de tous vos arrêtés, j’irai à Scutari, sans avoir traversé le Bosphore !

— Je me ferai un plaisir d’assister à votre arrivée, après un si curieux voyage ! répondit le chef de police.

— Et ce sera pour moi une joie véritable de vous trouver à mon retour ! répondit le seigneur Kéraban.

— Mais je vous préviens, ajouta le chef de police, que si la taxe est encore en vigueur…

— Eh bien ?…

— Je ne vous laisserai pas repasser le Bosphore pour revenir à Constantinople, à moins de dix paras par tête !

— Et si votre taxe inique est encore en vigueur, répondit le seigneur Kéraban sur le même ton, je saurai bien revenir à Constantinople, sans qu’il vous tombe un para de ma poche ! »

Là-dessus, le seigneur Kéraban, prenant Van Mitten par le bras, fit signe à Bruno et à Nizib de les suivre ; puis, il disparut au milieu de la foule, qui salua de ses acclamations ce partisan du vieux parti turc, si tenace dans la défense de ses droits.