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KÉRABAN-LE-TÊTU.

cristallisé commence à se déposer naturellement, on pourrait faire de cette mer Putride l’une des plus productives salines du globe.

Mais il faut le dire, à longer ce Sivach, il n’y a rien de bien agréable pour l’odorat. L’atmosphère s’y mélange d’une certaine quantité d’acide sulfhydrique, et les poissons, qui pénètrent dans ce lac, y trouvent presque aussitôt la mort. Ce serait donc là comme un équivalent du lac Asphaltite de la Palestine.

C’est au milieu de ces marais que se dessine le railway, qui descend d’Alexandroff à Sébastopol. Aussi, le seigneur Kéraban put-il entendre avec horreur les sifflets assourdissants que lançaient, dans la nuit, les locomotives hennissantes, en courant sur ces rails auxquels viennent se heurter parfois les lourdes eaux de la mer Putride.

Le lendemain, 31 août, pendant la journée, le chemin se déroula au milieu d’une campagne verdoyante. C’étaient des bouquets d’oliviers, dont les feuilles, en se retournant sous la brise, semblaient frétiller comme une pluie de vif-argent, des cyprès d’un vert qui touchait au noir, des chênes magnifiques, des arbousiers de haute taille. Partout, sur les coteaux, s’étageaient des lignes de ceps,