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KÉRABAN-LE-TÊTU.

Comment cette contrée, bénie des dieux et disputée des mortels, eût-elle pu échapper à l’enlacement des légendes mythologiques ? N’a-t-on pas voulu retrouver dans les marécages du Sivach des traces des gigantesques travaux de ce problématique peuple des Atlantes ? Les poètes de l’antiquité n’ont-ils pas placé une entrée des Enfers près du cap Kerberian, dont les trois môles formaient le Cerbère aux trois têtes ? Iphigénie, la fille d’Agamemnon et de Clytemnestre, devenue prêtresse de Diane, en Tauride, ne fut-elle pas sur le point d’immoler à la chaste déesse son frère Oreste, jeté par les vents aux rivages du cap Parthenium ?

Et maintenant, la Crimée, dans sa partie méridionale, qui vaut plus à elle seule que toutes les arides îles de l’archipel, avec ce Tchadir-Dagh, qui montre à quinze cents mètres d’altitude sa table où l’on pourrait dresser un festin pour tous les dieux de l’Olympe, ses amphithéâtres de forêts, dont le manteau de verdure s’étend jusqu’à la mer, ses bouquets de marronniers sauvages, de cyprès, d’oliviers, d’arbres de Judée, d’amandiers, de cythises, ses cascades chantées par Pouschkine, n’est-elle point le plus beau joyau de cette cou-