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On quitta Nina-Ruche, les uns causant, les autres chantant. Sur la grève glacée, chacun chaussa ses patins et s’en alla à sa guise, ceux-là isolément, ceux-ci par groupes. Le comte Timascheff, le capitaine Servadac, le lieutenant Procope restaient plus volontiers ensemble. Negrete et les Espagnols erraient capricieusement sur l’immense plaine et se lançaient avec une incomparable vitesse jusqu’aux dernières limites de l’horizon. Devenus très-forts à cet exercice du patinage, ils y déployaient avec une extrême ardeur la grâce qui leur est naturelle.

Les matelots de la Dobryna, suivant une coutume des pays du Nord, s’étaient tous placés en file. Une longue perche, fixée sous leur bras droit, les maintenait en ligne, et ils filaient ainsi à perte de vue, comme un train auquel les rails ne laissent décrire que des courbes de grand rayon.

Quant à Pablo et Nina, bras dessus bras dessous, jetant de petits cris de joie, — deux oiseaux auxquels on donne la volée, — ils patinaient avec une grâce inexprimable, revenaient au groupe du capitaine Servadac, s’enfuyaient de nouveau. Ces jeunes êtres résumaient en eux toute la joie et peut-être toute l’espérance de la terre gallienne.

Il ne faut pas oublier Ben-Zouf, voltigeant de l’un à l’autre avec une intarissable belle humeur, tout au présent et insoucieux de l’avenir.

La troupe patineuse, emportée par son élan