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d’appui. Au-dessus, se découpait une forêt de flèches, d’obélisques, de pyramidions. On eût dit une sorte de concrétion énorme, dont les cristallisations mesuraient plus de mille pieds d’altitude.

Mais là n’était pas le plus bizarre aspect de ce gigantesque massif. Ce qui devait prodigieusement étonner les explorateurs de la Dobryna, c’est qu’il semblait être « tout neuf ». L’action atmosphérique ne paraissait avoir encore altéré ni la pureté de ses arêtes, ni la netteté de ses lignes, ni la couleur de sa substance. Il se profilait sur le ciel, avec une incomparable sûreté de dessin. Tous les blocs qui le composaient étaient polis et brillants comme s’ils fussent à l’instant sortis du moule d’un fondeur. Leur éclat métallique, piqué d’irisations dorées, rappelait celui des pyrites. C’était à se demander si un métal unique, semblable à celui dont la sonde avait rapporté la poussière sous-marine, ne formait pas ce massif, que les forces plutoniennes avaient rejeté au-dessus des eaux.

Autre observation à l’appui de la première. Ordinairement, et en quelque endroit du globe que ce soit, les masses rocheuses les plus arides sont sillonnées d’humides filets que la condensation des vapeurs émet à leur surface et qui s’écoulent suivant le caprice des pentes. En outre, il n’est pas de falaise si désolée, qu’il n’y pousse quelques plantes lapidaires et ne s’y abrite quelques touffes de broussailles peu exigeantes. Mais ici, rien, ni le plus mince filet de cristal, ni la plus