Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/115

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Un dernier regard fut jeté à ces multiples paysages de la côte occidentale, à ce soleil dont le disque déclinant se balançait au-dessus de l’horizon et dorait de ses rayons obliques les blanches villas de Terreno.

Clovis Dardentor, Marcel Lornans et Jean Taconnat s’engagèrent dans l’étroite vis, qui se tordait à travers le mur, franchirent le pont, rentrèrent dans la cour et sortirent par la poterne.

La galera attendait à l’endroit où on l’avait laissée, le cocher flânant le long de la douve.

Le guide l’ayant appelé, il rejoignit de ce pas calme et géométrique, — le pas de ces mortels privilégiés qui ne mettent aucune hâte à rien en ce pays bienheureux dans lequel l’existence n’exige jamais que l’on soit pressé.

M. Dardentor monta le premier dans le véhicule, avant que le cocher fût venu prendre place sur la banquette de devant.

Mais ne voilà-t-il pas à l’instant où Marcel Lornans et Jean Taconnat allaient s’élancer sur le marchepied, que la galera s’ébranle d’un coup brusque et les oblige à reculer rapidement pour éviter le choc de l’essieu.

Le cocher s’est vite jeté à la tête de l’attelage, afin de le maintenir. Impossible ! Les mules se cabrent, renversent l’homme, et c’est miracle qu’il ne soit pas écrasé par la roue de la voiture qui part à fond de train.

Cris simultanés du cocher et du guide. Tous deux se précipitent sur le sentier de Bellver que la galera dévale au grand galop, avec le risque ou de choir dans les précipices latéraux, ou de s’éventrer contre les sapins de la sombre futaie.

« Monsieur Dardentor… Monsieur Dardentor ! clamait Marcel Lornans de toute la force de ses poumons. Il va se tuer !… Courons, Jean, courons !

— Oui, répondit Jean Taconnat et, pourtant, si cette occasion ne doit pas compter… »

Quoiqu’il en fût de cette occasion, il fallait la prendre aux che-