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réplique M. Caterna, trial à tout faire, qui chante les barytons au besoin.

C’est l’éternel duo de Pipo et de Bettina la rougeaude qu’ils répètent pour leurs futures représentations à Shangaï ! Heureux Shangaïens ! Ils ne connaissent pas encore la Mascotte !

Ici Fulk Ephrinell et miss Horatia Bluett causent avec un certain entrain, et je surprends ce bout de dialogue :

« Je crains, dit la courtière, que les cheveux soient en hausse à Pékin…

— Et moi, répond le courtier, que les dents soient en baisse. Ah ! s’il éclatait une bonne guerre, où les Russes casseraient la mâchoire aux Célestes… »

Voyez-vous cela ! Se battre pour fournir à la maison Strong Bulbul and Co. de New-York l’occasion d’écouler ses produits !

En vérité, je ne sais qu’imaginer, et nous avons encore six jours de voyage. Au diable le Grand-Transasiatique et son monotone parcours ! Le Great-Trunk de New-York à San-Francisco est plus mouvementé ! Au moins les Peaux-Rouges attaquent quelquefois les trains, et la perspective d’être scalpé en route ne peut qu’ajouter au charme du voyage !

Eh ! qu’est-ce que j’entends réciter ou plutôt psalmodier au fond de notre compartiment ?

« Il n’y a point d’homme, en quelque passe qu’il soit, qui ne puisse s’empêcher de trop manger, et qui ne doive se garantir des maux que cause la réplétion. Ceux qui sont chargés de la direction des affaires publiques y sont même plus obligés que les autres… »

C’est le docteur Tio-King, lisant à haute voix un passage de Cornaro, afin de mieux se graver ses principes dans la tête. Eh ! après tout, il n’est pas à dédaigner, ce principe, que le noble Vénitien émet à l’adresse des hommes politiques. Si je l’envoyais par télégramme au conseil des ministres ? Peut-être banquetteraient-ils avec plus de discrétion…

Pendant cette après-midi, si je m’en rapporte à l’indicateur, nous