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— Je vous accompagne, monsieur Dick !

— Arrêtez mes amis ! arrêtez ! Ce dessein fait honneur à votre cœur et à votre courage ; mais vous nous exposeriez tous, et vous nuiriez plus encore à celui que nous voulons sauver.

— Pourquoi cela ? reprit Kennedy. Ces sauvages sont effrayés, dispersés ! Ils ne reviendront pas.

— Dick, je t’en supplie, obéis-moi ; j’agis pour le salut commun ; si, par hasard, tu te laissais surprendre, tout serait perdu !

— Mais cet infortuné qui attend, qui espère ! Rien ne lui répond ! Personne ne vient à son secours ! Il doit croire que ses sens ont été abusés, qu’il n’a rien entendu !…

— On peut le rassurer », dit le docteur Fergusson.

Et debout, au milieu de l’obscurité, faisant de ses mains un porte-voix, il s’écria avec énergie dans la langue de l’étranger :

« Qui que vous soyez, ayez confiance ! Trois amis veillent sur vous ! »

Un hurlement terrible lui répondit, étouffant sans doute la réponse du prisonnier.

« On l’égorge ! on va l’égorger ! s’écria Kennedy. Notre intervention n’aura servi qu’à hâter l’heure de son supplice ! Il faut agir !

— Mais comment, Dick ? Que prétends-tu faire au milieu de cette obscurité ?

— Oh ! s’il faisait jour ! s’écria Joe.

— Eh bien, s’il faisait jour ? demanda le docteur d’un ton singulier.

— Rien de plus simple, Samuel, répondit le chasseur. Je descendrais à terre et je disperserais cette canaille à coups de fusil.

— Et toi, Joe ? demanda Fergusson.

— Moi, mon maître, j’agirais plus prudemment, en faisant savoir au prisonnier de s’enfuir dans une direction convenue.

— Et comment lui ferais-tu parvenir cet avis ?

— Au moyen de cette flèche que j’ai ramassée au vol, et à laquelle j’attacherais un billet, ou tout simplement en lui parlant à voix haute, puisque ces nègres ne comprennent pas notre langue.

— Vos plans sont impraticables, mes amis ; la difficulté la plus grande serait pour cet infortuné de se sauver, en admettant qu’il parvînt à tromper la vigilance de ses bourreaux. Quant à toi, mon cher Dick, avec beaucoup d’audace, et en profitant de l’épouvante jetée par nos armes à feu, ton projet réussirait peut-être ; mais s’il échouait, tu serais perdu, et nous aurions deux personnes à sauver au lieu d’une. Non, il faut mettre toutes les chances de notre côté et agir autrement.

— Mais agir tout de suite, répliqua le chasseur.