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trouvaient hors de portée ; il visita donc ses armes, et, avec sa lunette de nuit, il plongea de nouveau son regard dans l’espace.

Il crut bientôt entrevoir au-dessous de lui des formes vagues qui se glissaient vers l’arbre ; à un rayon de lune qui filtra comme un éclair entre deux nuages, il reconnut distinctement un groupe d’individus s’agitant dans l’ombre.

L’aventure des cynocéphales lui revint à l’esprit ; il mit la main sur l’épaule du docteur. Celui-ci se réveilla aussitôt.

« Silence, fit Kennedy, parlons à voix basse.

— Il y a quelque chose ?

— Oui, réveillons Joe. »

Dès que Joe se fut levé, le chasseur raconta ce qu’il avait vu.

« Encore ces maudits singes ? dit Joe.

— C’est possible ; mais il faut prendre ses précautions.

— Joe et moi, dit Kennedy, nous allons descendre dans l’arbre par l’échelle.

— Et pendant ce temps, répartit le docteur, je prendrai mes mesures de manière à pouvoir nous enlever rapidement.

— C’est convenu.

— Descendons, dit Joe.

— Ne vous servez de vos armes qu’à la dernière extrémité, dit le docteur ; il est inutile de révéler notre présence dans ces parages. »

Dick et Joe répondirent par un signe. Ils se laissèrent glisser sans bruit vers l’arbre, et prirent position sur une fourche de fortes branches que l’ancre avait mordue.

Depuis quelques minutes, ils écoutaient muets et immobiles dans le feuillage. À un certain froissement d’écorce qui se produisit, Joe saisit la main de l’Écossais.

« N’entendez-vous pas ?

— Oui, cela approche.

— Si c’était un serpent ? Ce sifflement que vous avez surpris…

— Non ! il avait quelque chose d’humain.

— J’aime encore mieux des sauvages, se dit Joe. Ces reptiles me répugnent.

— Le bruit augmente, reprit Kennedy, quelques instants après.

— Oui ! on monte, on grimpe.

— Veille de ce côté, je me charge de l’autre.

— Bien. »

Ils se trouvaient tous les deux isolés au sommet d’une maîtresse branche, poussée droit au milieu de cette forêt qu’on appelle un baobab ; l’obscurité