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L’HÉMISPHÈRE MÉDIDIONAL.

tage, d’un volcan en éruption. Aussi Barbicane n’hésita-t-il pas à se prononcer.

« Le Soleil ! s’écria-t-il.

— Quoi ! le Soleil ! répondirent Nicholl et Michel Ardan.

— Oui, mes amis, c’est l’astre radieux lui-même qui éclaire le sommet de ces montagnes situées sur le bord méridional de la Lune. Nous approchons évidemment du pôle sud !

— Après avoir passé par le pôle nord, répondit Michel. Nous avons donc fait le tour de notre satellite !

— Oui, mon brave Michel.

— Alors, plus d’hyperboles, plus de paraboles, plus de courbes ouvertes à craindre !

— Non, mais une courbe fermée.

— Qui s’appelle ?

— Une ellipse. Au lieu d’aller se perdre dans les espaces interplanétaires, il est probable que le projectile va décrire un orbe elliptique autour de la Lune.

— En vérité !

— Et qu’il en deviendra le satellite.

— Lune de Lune ! s’écria Michel Ardan.

— Seulement, je te ferai observer, mon digne ami, répliqua Barbicane, que nous n’en serons pas moins perdus pour cela !

— Oui, mais d’une autre manière, et bien autrement plaisante ! » répondit l’insouciant Français avec son plus aimable sourire.

Le président Barbicane avait raison. En décrivant cet orbe elliptique, le projectile allait sans doute graviter éternellement autour de la Lune, comme un sous-satellite. C’était un nouvel astre ajouté au monde solaire, un microcosme peuplé de trois habitants — que le défaut d’air tuerait avant peu. Barbicane ne pouvait donc se réjouir de cette situation définitive, imposée au boulet par la double influence des forces centripète et centrifuge. Ses compagnons et lui allaient revoir la face éclairée du disque lunaire. Peut-être même leur existence se prolongerait-elle assez pour qu’ils aperçussent une dernière fois la Pleine-Terre superbement éclairée par les rayons du Soleil ! Peut-être pourraient-ils jeter un dernier adieu à ce globe qu’ils ne devaient plus revoir ! Puis, leur projectile ne serait plus qu’une masse éteinte, morte, semblable à ces inertes astéroïdes qui circulent dans l’éther. Une seule consolation pour eux, c’était de quitter enfin ces insondables ténèbres, c’était de revenir à la lumière, c’était de rentrer dans les zones baignées par l’irradiation solaire !

Cependant les montagnes, reconnues par Barbicane, se dégageaient de