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duit presque toujours l’effet infaillible d’anéantir cette liberté elle-même. »

Mais jusqu’au jour où sera reconnue cette grande vérité, qu’il n’y a pas, qu’il ne peut pas y avoir de délits d’opinion, à qui confiera-t-on l’exercice de ce redoutable arbitraire ?

Il est indispensable dans tous les cas de le confier à des juges tout à fait indépendants du gouvernement, à des juges intéressés à maintenir cette liberté précieuse, en même temps qu’à empêcher la licence, ou plutôt le désordre auquel cette licence pourrait donner lieu.

C’est ce qu’avaient compris les Constituants de 1789, éclairés par l’expérience de l’Angleterre, qui a dû au maintien persistant de la liberté de la presse le développement de la liberté politique[1] , — en plaçant la véritable garantie de cette liberté précieuse dans l’institution du jury qui devait, suivant eux en rester inséparable.

« C’est là, disait Thouret au nom du comité de

  1. Le célèbre auteur anonyme des Lettres de Junius dit, dans la Dédicace à la nation anglaise placée en tête du recueil de ses lettres : « Ayez toujours gravé dans vos esprits et inculquez à vos enfants ce principe, que la liberté de la presse est le palladium de tous les droits civils, politiques et religieux d’un Anglais. » En Angleterre des lois draconiennes sont suspendues sur la presse, mais la liberté est protégée par le jury, qui est véritable garantie, plus efficace, et plus sûre que toutes les lois.