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souvenirs et promenades

vage, s’est faite plate à force de jardins potagers. Les beaux étangs noirs qui clapotaient en plein vent perpétuel du Nord, il y a des cygnes dessus, et de bêtes cyprins dedans, et une bordure « de granit rose » autour. Je m’y mire, et je vois une face grassouillette dont je demeure confus en présence de mon innocence, là, vivante jadis, et de tout ce qui s’est passé entre ma maigreur d’alors et ce ridicule embonpoint qui dit tant de choses digérées, de choses banales, laides, médiocres et lâches ! Et que bénit soit le sursaut vengeur me rendant tout à mon réel malheur, fier alors !

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II

C’est précisément après un séjour dans les Ardennes belges que je me rendis, en août 1868, avec ma mère, veuve depuis deux ans, à Bruxelles, dans l’intention d’y voir Victor Hugo qui, tous les ans, quittait sa maison de Guernersey pour « villégiaturer » chez son fils Charles.

Nous arrivâmes donc, par la petite gare du