Page:Verlaine - Œuvres posthumes, Messein, I.djvu/52

Cette page a été validée par deux contributeurs.


CORDIALITÉS

I


À Ernest Delahaye.


Dans ce Paris où l’on est voisin et si loin
L’un de l’autre que c’est une vraie infortune
De s’y voir, de s’y savoir tels, vu ce besoin
L’un de l’autre pourtant, qui donc vous importune !

Et ce désir commun à nos deux âmes l’une
De l’autre et de nos esprits, mutuels pingouins
L’un de l’autre, figés sur un écueil témoin
Par le flot qui s’oppose et la croissante brune !

Si bien qu’ils sont là, nos esprits, qu’elles, ô ces
Âmes nôtres, sont là, pauvres monstres blessés,
Dans cette ombre où l’on est si près de cœur et d’âme !

Ah ! secouons enfin cette torpeur infâme
Et soyons, non plus des pingouins, des colibris !
Prouvons que nous valons encore notre prix.