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mémoires d’un veuf

voulez. Je vous écoute. Quoi encore ? Ah ! le style vaguement argotique de quelques-unes des phrases miennes ? Je ne m’en déferai pas et pour cause. Par instants, un peu du ruisseau remonte un brin en ce moi qui fut élevé dans la ville où il y a la rue du Bac. C’est comme pour mes tournures patoisantes de quelquefois. Pure hérédité, cher monsieur ou chère madame, atavisme indéfectible ! Mes ascendants, dès l’avant-dernière génération, remuèrent -qui des guérets ancestraux, qui les archives héréditaires d’un tabellionat rural. — Reste… quoi ?

— Ouf ! Restent… nos moutons. Revenons-leur. Pourquoi si courts, hem, vos mémoires, ô veuf ! Tout au plus sont-ce des notes, des aperçus…

— Des mémoires gros comme le bras, monsieur, des mémoires, madame, — talent, génie, tout ce que vous voudrez à part, — à la Retz, à la Saint-Simon, à la Chateaubriand et à la tous ! Anecdotes, réflexions, maints quolibets, quelque littérature, l’histoire, tout et de tout y sera. Seulement ça manque et ça manquera de transitions.

— Comment y sera, comment ça manquera ? mais c’est écrit et fini ?

— J’ai l’intention de continuer jusqu’au naturel caetera desiderantur et de publier de temps en temps des extraits de cet ouvrage au jour le jour, quitte pour mes très riches héritiers à les réunir en autant de tomes qu’il se trouvera nécessaire.