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poèmes

IV


Les forts montent la vie ainsi qu’un escalier,
Sans voir d’abord que les femmes sur leurs passages
Tendent vers eux leurs seins, leurs fronts et leurs visages
Et leurs bras élargis en branches d’espalier.

Ils sont les assoiffés de ciel, nocturne hallier,
Où buissonnent des feux en de noirs paysages,
Et si haut montent-ils, séduits par des présages,
Qu’ils parvienent enfin au suprême palier.

Ils y cueillent des fruits d’astres et de comètes ;
Puis descendent, lassés de gloire et de conquêtes,
L’esprit déçu, les yeux ailleurs, les cœurs brûlés ;

Et regardant alors les femmes qui les guettent,
Ils s’inclinent devant, à deux genoux, et mettent
Entre leurs mains en or les grands mondes volés.