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les flamandes

Dans l’auge, dont les gars font choix pour le déduit,
Mêmes enlacements, mêmes cris, mêmes rages,
Mêmes fureurs d’aimer rugissant dans la nuit.
Et dès qu’il est levé, le soleil, dès qu’il crève
De ses boulets de feu le mur des horizons,
Voici qu’un étalon, réveillé dans son rêve,
Hennit et que les porcs ébranlent leurs cloisons
Comme allumés par la débauche environnante ;
Crête pourpre, des coqs se haussent sur le foin
Et sonnent le matin de leur voix claironnante ;
Des poulains attachés se cabrent dans un coin ;
Des chiens bergers, les yeux flambant, guettent leurs lices ;
Et les naseaux souillants, les pieds fouillant le sol,
Des taureaux monstrueux ascendent les génisses.

Alors vautrés aussi dans leur rut d’alcool,
Le sang battant leur cœur et leurs tempes blêmies,
Le gosier desséché de spasmes étouffants,
Et cherchant à tâtons leurs femmes endormies,
Eux, les fermiers, les vieux, font encor des enfants.