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Les vieux pommiers vaillants,
Au temps d’Avril et des sèves nouvelles,
Semblent une troupe d’oiseaux blancs
Laissant traîner leurs ailes,
En des vergers pleins de soleil.
Le vent est clair, l’air est vermeil,
L’amour des gars et des femmes superbes
Pousse, comme les fleurs, et se lève de l’herbe,
Robuste et fécondé.
On écoute rire et baguenauder,
Près des mares et dans les landes,
Les naïves légendes ;
Les vieilles coutumes mêlent encor
Leur beau fil d’or
Au solide tissu des mœurs et des paroles ;
On croit toujours aux sorcières et aux idoles ;
On est crédule et défiant, tout à la fois ;
On est rugueux, profond et lourd, comme les bois
Et sombre et violent, comme la mer brumeuse.


Ô l’Océan, là-bas, et sa fête écumeuse
À l’infini, sur les plages, l’hiver !
En ai-je aimé le vent et le désert !