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Comme un thyrse de chair, au clair des étendues,
Les caresses, les ors, les rages éperdues
Des vents et des soleils les mordront tour à tour ;
Nous serons un désir inassouvi d’amour
D’accord avec le cœur inassouvi du monde
Et réglant notre fièvre aux battements du sien !

— Il ne faut point songer à ces choses profondes ;
Je suis d’accord avec moi-même et le sens bien
Et c’est assez : le reste est mirage et fallace.
Et je surgis devant tes pas qui passent
Et je te tends mon corps d’où t’appellent mes seins ;
Je suis belle et puissante et mes baisers sont sains,
Tu me rêves complexe, étrange, âpre et subtile,
Tu me vois à travers tes livres inutiles ;
Or, je suis simple, ami, mais tout mon être agit
Avec un tel élan soudain, qu’on obéit.
Écoute :
Il fait soleil, dans mon amour, toujours !
Tous les désirs légers ou lourds
Y retrouvent leurs routes ;
Mon corps est un pays plein de roses en sang,
Plus doux que les paradis clairs sur les versants
Des montagnes, là-bas, aux premiers temps du monde.