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PIERRE

Avec mes deux pigeons dont le volant essor
Se jouait dans le vent et frôlait les nuages
J’ai bien des fois tenté le sort.
Ils partaient quelque jour pour de lointains voyages
Portés de train en train, jusqu’à la mer là-bas.
Leur retour au pays était lutte et combat.
D’une aile ardente et enivrée,
Ensemble ils traversaient de terribles contrées
Où l’aigle immense et brusque autour des monts planai
Au cœur même du ciel le péril foisonnait,
Mais la vitesse de leur course
S’exaltait au point qu’elle chassait le danger.
Souvent un même prix leur était partagé.
Oh ! le bel or clair et léger
Qui dans ces mois heureux illuminait ma bourse !