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— Oh ! les belles et soudaines vengeances ! Ils sont chassés
ceux qui nous chassaient. Leur foule encombre les grand’routes. Tous nos blasphèmes ont porté ; toutes nos malédictions, toutes nos prières, toutes nos colères !
— Là-bas, des troupeaux fuient vers les marais,
Des étalons cabrés cassent leurs traits
Et crient vers l’angoisse brandie ;
L’un d’eux s’échappe, avec de l’incendie
Et de la mort à sa crinière,
Il retourne la tête et mord la flamme
Qui dévore son cou ;
Regardez tous, voici des fous
Qui travaillent les feux avec des fourches.
— Les cloches s’affolent dans le vent. Les églises et les tours
s’écroulent. On dirait que Dieu même a peur.
— Sait-on pourquoi s’est déchaînée la guerre ?
— Tous les rois convoitent Oppidomagne. On la désire jusqu’au
bout de la terre.

Des gens anxieux accourent et s’engouffrent dans les chemins, au hasard. Quelques-uns s’arrêtent et crient :