James Ensor. Toutefois elle se précise encore si l’on note que l’ascendance paternelle de l’artiste est purement anglaise. Le nom qu’il porte n’est point flamand. C’est à Londres, qu’il se multiplie aux devantures. Je le vis flamboyer, un soir, dans Soho-square et plus loin il se projetait — réclame mouvante — sur un trottoir d’Oxford street.
L’œuvre que nous étudierons et exalterons s’élève donc au confluent de deux races — races saxonne, race flamande ou hollandaise — harmonieusement mêlées dans le sang et dans l’âme d’un très beau peintre.
L’erreur serait grande si l’on se figurait qu’à cause de ses origines
britaniques, Ensor se soit complu à réapprendre comme certains peintres
modernes l’art des Reynols ou des Gainsborough ou se soit assimilé
n’importe quelle méthode des préraphaélites illustres. L’anglomanie qui
s’est glissée jusque dans l’esthétique l’a épargné. Ce n’est point par
des qualités extérieures et souvent artificielles qu’il se rattache aux
maîtres de là bas, mais bien, naturellement, par certains dons
fonciers et rares. Il est de leur famille, sans le vouloir. Il est
audacieux et harmonieux comme Turner, sans qu’il s’y applique, sans
qu’il s’en doute. Il aime les effets tumultueux et larges de Constable
sans qu’aucune de ses toiles fasse songer aux paysages célèbres de ce
grand peintre. La parenté est souterraine et comme secrète. Elle se
manifeste dans la manière de comprendre et d’aimer la nature, dans la
sensibilité aiguë de l’œil, dans la franchise et l’audace des
conceptions, dans la pratique du dessin pictural, dans la délicatesse mêlée