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de plaisir, quand on va la chercher hors de chez soi.

Henriette pleurait à chaudes larmes. Honoré me serrait sur son cœur ; mais l’envie de voyager était plus forte que l’émotion des adieux, et je cherchais à me dégager.

À ce moment, les routes aux abords de Paris étaient encore pavées et bordées de grands arbres. En écoutant le bruit des voitures et le vent qui faisait crier les branches et bruire les feuilles, je me sentais palpiter d’impatience et de bonheur.

De tout ce que je voyais, de tout ce que je m’attendais à voir, surtout, je faisais un monde, et je disais à chaque instant : Partons. Henriette me donna une petite robe, Honoré un chapeau de paille à larges bords. Ils n’étaient riches ni l’un ni l’autre, cependant ils nous offrirent un peu d’argent. Ma mère les rassura :

— J’ai ce qu’il faut pour moi et pour Céleste.

Leur bon cœur se gonfla, car ils savaient bien que nous sortions de l’hôpital sans un sou, mais ils n’osèrent pas insister. Nous échangeâmes ces baisers des malheureux qui ne ressemblent en rien aux caresses des gens du monde, et nous nous séparâmes en prenant chacun la route opposée.