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vais payé de mon suicide moral. Je ne voulais pas me réhabiliter, on ne se réhabilite jamais quand on est tombé si bas ! mais, je le répète, je n’attaquais pas, je me défendais. Je ne voulais pas exciter de pauvres créatures à suivre mon exemple, à marcher sur mes traces ; je voulais leur montrer les écueils de ce genre de vie, leur prouver qu’une honnête fille, respectée dans sa misère, est plus heureuse que ces réprouvées auxquelles il ne reste pour l’avenir que le mépris et l’abandon. Voilà sous quelle impression j’ai écrit ces mémoires auxquels on a donné beaucoup trop d’importance.

S’il a figuré à mes côtés des personnes qui ont pu se reconnaître, je le regrette ; mais j’avais pensé que des mémoires devaient être vrais et qu’on n’avait pas le droit d’arracher à sa fantaisie une page du livre de sa vie. Croyant m’être trompée, j’ai voulu les retirer, les annuler ; j’ai fait une demande en résiliation de traité ; j’ai gagné en première instance. Mais la cour impériale m’a condamnée, le 7 mars 1858, à remplir les conditions du traité. Que puis je à cela ? Faire dans ces mémoires des changements étrangers à ma personne, car je ne veux pas me cacher derrière une ombre, mentir aux autres en cherchant à me tromper moi-même. Ce qui est fait est fait, je ne puis rien au passé ; n’est-ce pas déjà beaucoup que d’avoir à répondre de l’avenir ?

Depuis, je crois avoir prouvé que ma volonté de bien faire n’était point une fiction. J’ai entrepris un travail long et pénible, parce que j’ai eu peur à l’idée de n’être plus aimée de celui qui, cédant à un mou-