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gré sa grande jeunesse, qui le premier parla de se servir des eaux de l’Arno pour en faire un canal de Pise à Florence (2). Mais sa vocation voulait qu’il fût peintre : il dessinait beaucoup d’après nature, et modelait en terre des figures, qu’il drapait ensuite avec des chiffons mouillés et enduits de terre ; puis, sur certaines toiles de linon ou de batiste, il dessinait avec soin, à la pointe de sa brosse, avec un peu de blanc et de noir, ces études qu’il rendait admirablement, comme le prouvent quelques figures que nous conservons dans notre recueil. Il dessina aussi sur le papier, avec une pureté et une perfection que jamais personne n’a pu atteindre. J’en pourrais fournir la preuve par la magnifique tête, pleine d’effet et de caractère, que je possède.

Dieu avait vraiment donné à cet homme sublime un tact exquis pour concevoir, et une terrible puissance pour démontrer. Intelligence, mémoire, dessin, parole, tout concourait au triomphe de ses idées, qu’il imposait en résolvant et détruisant les objections les plus fortes.

Il composait une quantité de modèles et de dessins pour prouver : qu’ici l’on pouvait aplanir une montagne ou la percer, afin d’unir deux plaines ; que là, au moyen de vis, leviers et cabestans, on pouvait soulever ou tirer des poids énormes ; qu’ailleurs, à l’aide de pompes, on pouvait curer un port et faire monter les eaux. Enfin sa tête était en travail continuel, et de tous ces projets il est résulté un grand nombre de dessins qui sont épars çà et là entre les mains des artistes : j’en ai vu beaucoup. Il s’amusait même à