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ANTONELLO DE MESSINE.

de l’air, du soleil, de l’humidité, et même de la main de l’homme, il est d’absolue impossibilité de déterminer si les couleurs dont il est formé, et que l’on aura confiées au creuset, ont été liées avec tel gluten plutôt qu’avec tel autre. Il y a des gens qui ne reculent devant rien. Quelques-uns de ces imperturbables analyseurs ne craignent pas de dire : Nous reconnaissons la présence d’une substance oléagineuse et siccative sur ce tableau, mais les couleurs n’ont été primitivement délayées qu’avec de l’eau. Or, personne n’ignore que les couleurs minérales, comme le blanc, broyées à l’eau, conservent après l’évaporation des qualités tellement absorbantes, qu’elles s’imbibent de l’huile étendue sur leur superficie à ce point que le chimiste le plus consommé ne saurait établir la moindre différence entre elles et les couleurs préparées à l’huile. La chimie n’a donc rien à démêler dans la question qui nous occupe, elle est impuissante. Restent les traditions historiques et les écrits authentiques. Ce n’est point à nous à décider si ceux que nous avons produits sont de poids à l’emporter sur ceux de nos adversaires. S’il ne se fût point agi de Théophile, s’il se fût agi seulement de prouver que la peinture à l’huile était connue longtemps avant Van-Eyck, nous nous serions contentés de jeter dans le plateau de la balance ces mots du grand Lorenzo Ghiberti : « Giotto lavoro a olio… Giotto peignit à l’huile. »