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Car, voisinant le ciel, ils imitent la lune,

Nuageant leurs esprits de mille vanitez.

Avons-nous rien plus cher au monde avec la vie
Qu’un honneur bien acquis au champs de la vertu,
Affin que la memoire en demeure infinie
À ceux quy nous suivront par ce sentier battu.

Doncques en quelque lieu où le sort nous attire,
Ne nous mecognoissons après des biens acquis ;
Et plus nous sommes grands, petits il nous faut dire,
Car c’est l’honneur des grands de se dire petits.

Toujours l’humilité rend de la gloire aux hommes,
Plus que s’ils recherchoient la gloire ambitieux :
Car on n’estime point, en ce siècle où nous sommes,
Ceux quy pour leurs estaz se rendent glorieux.

J’ay autrefois apprins ce regime de vivre
D’un des galants esprits quy soit de nostre temps,
Et lors je le priay me permestre de suivre
Sous l’aisle de son nom les beaux enseignements.

Il ne m’eust pas si tost donné cette licence,
Que j’allay rechercher les Muses pour appuy,
Quy, m’ayant donné part à leur juste science,
Me firent pratiquer ces preceptes de luy.

Depuis j’ay recherché les sylvestres boccages
Et les lieux plus affreux des deserts ecartez,
Où j’ay plus exercé mes coustumiers ouvrages
Que les renseignements que j’avois emportez.