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mais messieurs les courtisans se ruent, ou directement ou indirectement, pour acheminer ce mariage.

M. le cardinal subsiste, non-seulement parce que le roi l’aime tendrement, mais il l’estime et il le craint. Et quand la reine voudroit détruire les sentiments de Sa Majesté, elle ne le pourroit faire. Le cardinal a en sa main tous les honneurs et biens à distribuer ; il ne faut donc pas s’étonner si l’on s’attache à lui. Le cardinal n’a point de confident particulier, mais il change suivant les occasions ; il connoît fort bien le pas glissant où il est, mais il aime mieux périr honorablement que de se retirer lâchement.

Il n’y a point d’apparence qu’il lui arrive rien ni par poison, ni par assassinat, ni par disgrâce, et, très assurément, il se maintiendra ; et tout l’Etat demeurera tranquille, excepté que les Anglais entrassent en France15, ou que M. le prince de Condé


voit penser, c’est Mazarin lui-même qui l’empêcha. Il éloigna sa nièce, et négocia le mariage du roi avec l’infante d’Espagne. Les courriers royaux portèrent pendant plusieurs mois à Brouage, exil de Marie, les billets du prince amoureux. Mazarin le sut, et les lettres qu’il écrivit alors au roi pour lui reprocher avec énergie de compromettre ainsi le résultat des conférences commencées, prouvent, à sa gloire, que l’honneur royal lui étoit plus cher que l’intérêt de sa famille. « Jamais, dit M. Bazin au sujet de ces lettres, dont les originaux existent, jamais homme réputé vertueux dans l’histoire n’a laissé un plus beau document à l’appui de sa renommée. » Hist. de Mazarin, t. IV, p. 424.

15. Ce qui ne fut pas longtemps à craindre, grâce à