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Ant. Non, certes, on nous mange ; et si nous ne sommes pas bien venés, nos fermiers ont tout perdu.

Guer. I vous en dis lou mesme, iquets gendarmeas me mangirant tout, jusques à ine belle oie ; oletet plgene de gravité espagneule, et sembglet ine grosse espousée de vilage, la povre oye ! Olet ine grousse perte, elle fut engoulée avec les otres, et cré qu’is la mangirant plgume et tout tant is estiant afamez.

Pan. Tu l’as donc perdue ?

Guer. Voire, da ! et aguis ine bele pour iquele journée. Vous otres avés ouy dire et avés veu que d’otre tans lous gendarmeas se couvriant d’acié, de lames treluisantes qui esclatiant au soleil ; mai olet ben in otre tans. I rencontris l’otre mardy diquets reformateurs qui vouliant faire ine otre France, ô qu’is estiant afrous ! lous uns chargés d’ine pèce de terre, otres montés sur daus mouleins à vent, plusieurs sur mouleins d’eue, otres jambe deça, jambe de la sur ine pièce de vigne ; otres sur des fiefs en parchemin. Is estiant tous suans et poudrous.

Ant. Voilà de belles gens, et fort ambitieux ! Nous cognoissons tous ces vaillans guerriers. Ô les bonnes lames !

Pan. Messieurs de la Vigne, du Pré, du Moulin8, des fiefs en parchemin fort nouveau qui se fait


Recueil de l’origine de la langue et poésie françoise, 1581, in-4, p. 141.

8. Il a déjà été parlé de ces paysans qui s’ennoblissoient de leur propre autorité et se faisoient appeler, soit, comme ici, M. du Pré, soit M. du Buisson, M. de la Planche. V. t. 6, p. 332, une citation du Paysan françois à ce propos.