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emprunter, vendre et se desborder en toutes voluptez, et enfin payer ses creanciers en belles cessions ou en faillites54. Voilà comment la cherté nous provient du degast.

Les monopoles des marchans, fermiers et artisans, sont la troisiesme cause de la cherté. Car premierement, quant aux artisans, lors qu’ils s’assemblent en leurs confrairies pour asseoir le pris des marchandises, ils encherissent tout, tant leurs journées que leurs ouvrages ; dont par plusieurs ordonnances lesdites confrairies ont esté ostées55. Mais comme en France il n’y a point faute de bonnes loix, aussi n’y a-t’il point faute de la corruption et contravention à icelles.

Et quant aux fermiers et marchands, on voit ordinairement que dès que les bleds se recueillent, les marchans vont par païs, et arrent et achetent tous les bleds ; et mesmement depuis quatre mois cela s’est veu, que les marchans ont enlevé, arré et retenu tous les bleds et toutes les granges des champs. Ils ont veu que les deux ou trois années precedentes ont esté presque aussi steriles que ceste-cy, et que sur leur sterilité est survenue la guerre de la


54. C’étoit l’expression déjà consacrée. La banqueroute n’étoit que la conséquence de la faillite. Quand celle-ci étoit constante, par l’aveu même du marchand, qui s’étoit déclaré faillito, le banc qu’il avoit le droit d’avoir à la place du Change étoit rompu (banco rotto, banca rotta). « Ces glorieux de cour, dit Rabelais, les quels voulant en leurs divises signifier bancqueroupte, font pourtraire un banc rompu. »

55. V. une des notes précédentes.