Page:Variétés Tome V.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour les grandes rigueurs de ceux de La Rochelle.

Testament.

Premier que de mourir en presence du monde,
Faut que je boive un coup, puis que la mort feconde
Veut ravir mon esprit, et que mon testament
Se face devant tous à l’œil du regiment.
Je donne mon mousquet, fourchette5 et bandollière,
Mesche, bales et poudre, au sergeant la Rivière ;
Mon argentine espée et mon cher baudrier,
Pour recompense, c’est pour ces trois ferailliers ;
Je donne mon manteau, mon bonnet et jartières,
Pour ce que j’ay ces jours eu de la Boisselière6 ;
Mon pourpoint de satin, mes chausses de velours,
Cela est reservé pour les droicts du tambour ;
Mes souliers, mes chemises, mes bas, aussi mon sac,
Sont pour le bon service que j’ay de mon goujac7 ;
Pour l’argent de mes monstres, c’est pour m’ensevelir ;
Mon chapeau et panache, c’est pour payer mon lict.
À Dieu je rends mon ame et mon corps à la terre.
Priez Jesus pour moy, vous tous, frères de guerre,


5. Les mousquets étant alors trop lourds pour qu’on pût les tirer en les tenant au bout du bras, on les appuyoit sur un bâton fiché en terre et terminé par une fourchette de fer. Molière, dans le mémoire d’Harpagon, mettant en ligne de compte trois gros mousquets ornés de nacre de perle, n’oublie pas les fourchettes assortissantes.

6. Cabaretière du quartier du Louvre où l’on faisoit de gros écots. V. notre édition des Caquets de l’Accouchée, p. 28.

7. Goujat, valet d’armée. V. notre t. 4, p. 364.