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partysans. — Ha ! Monsieur, me dit-elle, ne vous mocquez point de moy ; vous parlez d’un temps qui n’est plus. Toutes les choses sont bien changées, et j’ay honte de vous dire qu’il faut que je m’abandonne maintenant aux valets dont les maistres s’estimoient naguères heureux de me posseder. — Si est-ce, luy repliquay-je, que vous n’estes pas moins belle ny plus agée que vous estiez. Vous avez raison, continua-t-elle ; mais la misère du temps est cause de ce desordre. La cherté du pain a bien amandé nostre marchandise, et, si je vous disois qu’il n’y en a pas un morceau chez moi, vous auriez bien plus sujet de vous estonner ; mais je le dis à un galand homme, me dit-elle en me prenant la main, et qui ne me refuseroit pas une pistole si j’en avois affaire. La sedition, venant à croistre tout à coup, me desbarassa de la peine de luy respondre, et me servit de pretexte de m’esloigner et de la perdre de veue. Ce fut alors que je vis les deux partys formez estre tous prets d’ajouster les coups aux paroles et aux injures. Les mescontens lassez de la guerre disoient qu’il falloit resolument faire la paix et piller tous ces rongeurs qui peschent en l’eau trouble ; les contens, au contraire, les appelloient des seditieux, qui ne servoient de rien dans Paris et qui ne portoient les armes qu’à regret ; enfin, l’on s’alloit frotter tout à bon, sans la compagnie de l’isle du Palais17, qui, en allant


17. Elle veilloit à la sûreté de tout ce quartier, qui n’étoit pas le mieux gardé de Paris. Nous avons ailleurs parlé de Defunctis, prévôt de robe courte, qui commandoit cette compagnie sous Louis XIII. V. notre t. 2, p. 162–163, note.