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Que deviendrai-je, helas ! sans force et sans vertu,
Si le plus fort athlète est lui-même abbatu ?
Spectacles seducteurs, delices condamnées,
Et vains amusemens de mes folles années,
Vous remplîtes mon cœur d’un feu tout criminel,
Et je brule aujourd’hui, même au pied de l’autel.
Ce feu, qui, grace au ciel, s’eteignoit dans mon ame,
Excité de nouveau, s’y rallume et l’enflame.
Hé quoi ! de tels objets dans l’église, en un lieu
Où tout nous doit parler de ton amour, grand Dieu !
Où tout doit être pur d’une pureté d’ange !
Ô detestable abus ! renversement etrange !
Quel est, dira quelqu’un, ce critique chagrin
Qui veut laisser languir la veuve et l’orphelin,
Qui, d’un zèle indiscret blâmant toute parure,
Ne voit pas qu’elle seule attendrit l’ame dure3,
Que par là dans ses maux le pauvre est assisté,
Que plus abondamment se fait la charité ?
Quoi ! cette charité, cette vertu suprême,
Qui fait qu’on aime Dieu beaucoup plus que soi-même,
Qui s’occupe du soin de sauver le prochain,
Va parée en idole une bourse à la main,
Passe de chaise en chaise en pompeux equipage,
Fait marcher à sa suite et demoiselle et page,



3. Le chevalier de Cailly avoit déjà dit dans une de ses épigrammes :

Aux jours que va quêter la charmante Belise,
——--Elle furète de l’église
——--Les quatre coins et le milieu,
Et tous ceux que l’on voit donner à cette belle
——--Donnent moins pour l’amour de Dieu
——--Qu’ils ne donnent pour l’amour d’elle.