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Notre sexe est en butte aux outrages des hommes.
C’est trop nous taire, il faut leur montrer qui nous sommes.
Hé ! pourquoi respecter ces superbes rivaux,
Corinne ? Comme nous n’ont-ils pas leurs deffauts ?
Nous ne les attaquons, du moins, qu’en represailles.
Tu vois qu’ils s’en sont pris jusqu’à nos pretintailles3.
En nous, s’ils en sont crus, tout est capricieux ;
Une mouche, un ruban, tout leur blesse les yeux.
Cependant, si chacun connoissoit son caprice,
Si chacun prenoit soin de se rendre justice,
Peut-être on ne sçauroit de quel côté pencher,
Et l’on n’auroit enfin rien à se reprocher.
Je suis de bonne foi, je sçai que nos coquettes
Plus haut qu’il ne faudroit font monter leurs cornettes4 ;
Mais on ne les voit point relever leurs beautez
Par un enorme amas de cheveux empruntez.
Peut-on, sans eclater, voir l’affreuse perruque
De l’insensé Creon, dont la face caduque
Sous un masque trompeur se flate à contre-tems
De cacher à nos yeux le ravage des ans ?
Une vaste coëffure en vain couvre ses rides :
La mort, peinte dejà sur ses lèvres livides,
Annonce que son ame est prête à s’exhaler,



3. On appeloit ainsi, à la fin du XVIIe siècle, « les falbalas, les franges, les découpures et autres agréments qu’on mettoit aux écharpes des femmes. »

4. C’est à la fin du XVIIe siècle que les cornettes à plusieurs étages devinrent surtout à la mode. Les comédiennes qui jouent Philaminte, Belise, Belène, et quelques autres rôles marqués des pièces de Molière, ont l’habitude de s’en coiffer ; c’est un tort : quand Molière mourut, en 1673, il falloit attendre encore quelques années pour voir cette coiffure à la mode.