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me d’un profond sommeil, et ses yeux plains de chassie à demi-ouverts, luy dit : Par ma foy ! maistre Guillaume, mon amy, je songeois au bon temps que j’avois lors que les coquilberts firent leurs entrées en France, la guerre cruelle qu’ils eurent contre les mousches14, leurs batailles, le nombre des bons capitaines coquilbardiers, et comme du temps et du règne du bon père Louvet ils vivoyent ; et comme aussi, d’autre part, nostre bon maistre, depuis peu de temps en çà, a descouvert toutes sortes de coquilberts, soit ceux de messieurs les petits dieux du monde, soit sur leurs saincts, et qu’à present il n’y a qu’un general en matière de coquilbarderie, qui est cause que les pauvres mousches ne tirent plus de miel de leurs ruches.

Ha ! ha ! Piedaigrette, mon amy, je te prie me declarer quelles bestes sont-ce que coquilberts ; j’ay veu beaucoup de bestes après toy, mais je n’ay en-


14. Ce mot, d’où est venu celui de mouchard, s’employoit depuis long-temps déja, et même bien avant l’entrée en fonctions de l’inquisiteur de Mouchy (Democharès), pour lequel, selon Ménage et le président Hénault, on l’auroit d’abord créé en équivoquant sur son nom. Il se trouve déjà dans le poème d’Antoine du Saix, l’Esperon de discipline pour inciter les humains aux bonnes lettres…, Paris, 1539, in-16. — Selon le Martyrologe des protestants (1619, in-8, p. 530), les espions de l’inquisition d’Espagne s’étoient d’abord appelés mouches. « Plusieurs de ces mousches, y est-il dit, volent si haut et si loin que, passant la mer, ils iront en estranges et loingtains pays espier ceux qui, se bannissants eux-mesmes d’Espagne, se seront à seureté retirez en quelque part. »