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Si c’est la fille de quelque crocheteur qui serve à quelque bonne maison, et que de petite marmitonne elle parvienne à estre fille de chambre, elle se fardera aussi bien que sa maistresse, et elle se fera croire qu’elle sera la fille de quelque bon marchant ; toutefois elles ont raison, car leur père sera marchant de paille, de cotterests ou de fagots ; il se trouvera quelque valet de chambre qui aura bonne mine, et rien plus, croira que ma glorieuse aye force pistoles, et n’aura que le cul et trois ou quatre paires de meschans habits, la prendra en mariage. Ont-ils esté un an et demy, ont-ils grugé leur fait, il n’y a plus personne au logis, il faut vendre tout pièce à pièce, et puis mon cadet se met au regiment des Gardes, et ma glorieuse, toute crottée, salle, puante de pauvreté, sera bien heureuse de trouver quelque maison de procureur pour estre servante de cuisine.

Si c’est la fille de quelque fruicterie, et que pour l’honneur de Dieu l’on la prenne en quelque bonne maison pour nettoyer les souliers, ou bien laver la vaisselle, et qu’elle parvienne à estre servante de cuisine, a-elle esté deux ou trois ans à cet exercice, elle deviendra glorieuse, sans faire semblant de cognoistre ses parens, voire sa propre mère, qui demandera un pauvre morceau de pain à la porte du logis, et elle s’amusera à se faire brave aux despens de l’ance du panier ; après, aura-elle ferré la mule, il faut faire l’amour et attraper le cocher ou le cuisinier du logis ; sont-ils mariez, ils auront soixante ou quatre-vingts escus, il faut faire bonne chère et ne rien faire tant que l’argent dure ; au bout de