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Pour moi, je n’ai plus rien !

Avec 4 francs, je parvenais tout juste à ne pas mourir.

J’ai essayé de tout pourtant !

Ah ! je n’ai rien à me reprocher !

Sanglier acculé dans la boue, j’ai fouillé de mon groin toutes les places, j’ai cassé mes défenses contre toutes les pierres !

J’ai dit ba be bi bo bu, chez celui-ci, j’ai mangé du raisiné chez celui-là. J’ai mouché des enfants, rentré des chemises : À moi le pompon !


J’ai passé chez Bonardel et chez Maillart.

J’ai été satiriste, chansonnier et chaussonnier. J’ai tout fait de ce qu’on peut faire quand on n’a pas d’état — et que l’on est républicain !


J’ai fait plus encore !

Je trouve une joie amère à m’en souvenir et à pétrir cette pâte de douleur bête, en ce moment de récapitulation douloureuse.


J’avais connu dans un coin de crémerie un employé de la maison de déménagements Bailly. On avait mangé l’un près de l’autre ; lui, des plats de huit sous ; moi, des demi-portions.

Un jour, je suis allé le trouver.

« Puis-je gagner trois francs comme aide déménageur dans votre boîte ?

— Vous ? »

Le brave homme était tout honteux pour moi, et