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on explora toutes les littératures étrangères, un traduisit tous les chefs-d’œuvre étrangers : notre langue et notre littérature firent aussi leur tour du monde. L’intelligence humaine respirait.

Descendrons-nous à des détails plus minutieux et plus vulgaires dans l’étude de ce soudain changement à vue qui s’accomplit presque le lendemain de l’entrée à Paris des armées étrangères, le lendemain du retour des Bourbons ?

On n’eut pas seulement à constater une variation nouvelle dans les modes françaises, mais bien une révolution dans le costume français ; nous empruntâmes surtout aux uniformes russes et prussiens une heureuse innovation. La taille des habits, les corsages de robes s’allongèrent ; on s’habilla enfin avec une intelligence profitable des nécessités physiologiques. En coupant en deux la poitrine par la taille serrée de nos vêtements, on gêne les mouvements de tout l’appareil extérieur de la respiration ; en plaçant la taille de nos vêtements au-dessous de l’appendice sternal, le jeu des côtes, du sternum[1] et du diaphragme[2] n’est point entravé. On réforma, par la logique et par la science, jusqu’à l’art des couturières et des tailleurs.

Nous empruntâmes aux Anglais, en 1811, un art nouveau en France, plus nouveau qu’on ne le pense peut-être : l’art de la propreté. On était soigné, parfumé, sous l’ancien régime, mais pendant les plus mauvais jours

  1. Le sternum est un os avec les cartilages duquel vient s’unir l’extrémité antérieure des côtes, et qui se termine en bas par un appendice.
  2. Le diaphragme est un muscle très-large, cloison mobile entre la poitrine et l’abdomen.