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rer la royauté et rester les hommes du temps présent. On accusa même Louis XVIII d’être un des auteurs de la Famille Glinet.

Dès la rentrée de la famille royale, dans les hautes régions du pouvoir comme au sein des populations, et malgré ces transports d’allégresse, malgré ces bruyantes manifestations, surgissaient déjà des dissentiments, des antagonismes, des résistances : tout était difficulté, les personnes et les choses ; les uns voulaient marcher en avant, les autres voulaient marcher en arrière ; à propos de toutes les questions, l’ancien régime et la monarchie constitutionnelle, imposée par la charte du sénat, se trouvaient en présence, et c’était à qui ne céderait pas.

On laissa sans conteste, et avec bonne grâce, la famille royale rétablir autour d’elle l’ancienne étiquette, s’entourer d’un grand maître de la garde-robe, de premiers gentilshommes de la chambre, d’un premier maître d’hôtel, créer une garde royale, créer des gardes du corps du roi, des gardes du corps de Monsieur, des gardes de la porte, des Cent-Suisses, une maison rouge, des mousquetaires. On laissa la famille royale rappeler en France des régiments suisses. Mais les grands meneurs de la politique se réservaient la liberté de la presse, la liberté de la tribune, le suffrage direct pour les élections. Ils laissaient à la royauté toutes les magnificences de la cour, tous les vains prestiges de l’étiquette la plus pompeuse, tous les plumets de la situation ; mais ils gardaient pour eux toutes les forces vives du pouvoir et l’initiative des lois. On voulait bien que Louis XVIII eût