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d’administration avec une précision, une clarté qui étonnent les hommes les plus habitués au travail. Le décadi est donné à un peu plus de repos ; il va passer ce jour à la campagne ; madame Chabaud y était avant-hier à dîner ; il y avait un singulier assortiment : l’ambassadeur turc, deux chefs de chouans pacifiés, des sénateurs, des législateurs, des peintres, des poëtes, enfin sa famille très-nombreuse. Voilà à quoi se bornent ses plaisirs ; ce jour-là on reste une heure à table, mais ordinairement il a fini son repas en vingt minutes. Je te donnerai des détails sur celui d’aujourd’hui.

» On a battu les chouans il y a quatre jours ; j’ai vu sept de ces pèlerins qu’on va fusiller : ils ont un uniforme gris avec gilet et revers rouges. Cette guerre est difficile à faire ; il y a beaucoup et de bonnes troupes. Le quatrième frère de B…, colonel du 5e de dragons, est parti il y a peu de jours, avec son régiment, pour ce pays-là.

» On a envoyé des secours à Malte ; il paraît qu’on tient beaucoup à ce pays et à l’Egypte. On parle peu de paix et l’on y croit faiblement. Au reste, tout est fort secret.

» Je m’amuse médiocrement et ne serai pas fort retenu quand j’aurai fini mes affaires. J’espère faire venir mon dépôt à Sedan.

» Adieu ! Ecris-moi ; mes amitiés à tes dames. »



Le 12 pluviôse an viii.

« Je t’ai promis quelques détails, mon ami, et viens te les donner. J’ai reçu ta lettre ce matin ; je le remercie